Décryptage. L’année 2016 sera-t-elle considérée comme le meilleur cru de l’entreprise de la télévision algérienne ? Ou alors les quelques chaînes privées et « offshore » ont-elles réussi à détrôner celle que l’on surnommait autrefois « l’orpheline » ?
Place aux productions nationales !
Fait notable, cette année ce sont les productions nationales qui sont mises à l’honneur. En début de ce mois, Tewfik Khelladi, directeur général de la télévision nationale, annonçait que la grille de programmation serait composée à 96% de productions nationales en langues arabe, tamazight et française, réparties sur cinq chaînes.
« Il est tout à fait normal qu’une chaîne nationale privilégie la production nationale. Théoriquement l’autorité de régulation doit imposer des quotas. Officiellement, il n’y en a pas, on parle plutôt d’encouragement de la production nationale », explique Youcef Aggoune, spécialiste de la veille médiatique en Algérie et directeur de Media Marketing.
Que vous propose la télévision pendant ce mois de ramadan ?
Cette année, les spectateurs algériens pourront occuper leurs soirées avec les diverses émissions politiques, humoristiques, ou culturelles. Comme tous les ans, les divertissements prennent également leurs quartiers, série et autres caméras cachées sont donc de sortie pour amuser ou faire pleurer le public algérien. Sur ce dernier point, les chaînes ont innové et même les responsables politiques n’échappent pas au canular, à l’image du ministre de la Santé, victime de la chaîne Ennahar TV lors d’une interview piège.
Sur Echourouk TV, on mise sur l’action-comédie avec la série « B73 », adaptation de la production tunisienne « Bolice ». Un programme qui ne laisse pas les internautes indifférents et qui est critiqué par des médias algériens pour le jeu d’acteur et la différence de moyens engagés sur les productions algérienne et tunisienne.
Du côté de l’ENTV, on retrouve la sitcom « Bibiche & Bibicha » autrefois intitulée « Bent Walad » et diffusée sur une chaîne privée. La série de 30 minutes inspirée du concept « un gars, une fille », rencontre un succès perceptible sur la toile où les trois premiers épisodes de la saison ont été visionnés par une moyenne de 42 000 personnes.
Désormais, les chaînes et sociétés de production sont de plus en plus enclines à mettre en ligne leurs réalisations et de leur côté les internautes ne se privent pas pour commenter et critiquer les différents programmes.
Sur les réseaux sociaux, les internautes ne sont pas tendres avec les programmes proposés par les chaînes algériennes. Chez certains, la nostalgie des anciennes émissions est notable :
L’ENTV s’adapte
Sofiane Maloufi gère une agence de communication qui propose un pôle dédié exclusivement aux études médias. Sa réflexion sur la programmation 2016 du ramadan, se base sur le côté qualitatif. « Le service public nous a surpris par sa capacité à adapter ses programmes par rapport aux attentes. Ce sont des programmes adaptés à tous types de spectateurs : selon la catégorie, l’âge », explique Sofiane Maloufi.
Selon lui, la stratégie marketing adoptée par l’ENTV est différente. « Ce qui m’a surpris cette année, c’est la finesse de la programmation du service public. À titre d’exemple, à la fin de la sitcom sur A3, on enchaîne directement avec la diffusion de ‘Bibicha et Bibichou’ sur Canal Algérie. Il y a une réflexion qui s’est installée, concernant l’enchaînement logique des programmes », détaille-t-il.
Petit bémol sur Echourouk TV
En comparaison, M. Maloufi prend l’exemple d’Echourouk TV, qui selon lui se positionne assez bien avec sa grille ramadanesque. « Il y a pas mal de programmes proposés au public sur Echourouk TV sauf qu’il y a un sérieux bémol concernant le timing », souligne-t-il.
« Il y a un manque de communication concernant l’annonce du programme, l’ordonnancement, le timing… on ne connaît pas les horaires et forcement on se retrouve à zapper au hasard », juge Sofiane Maloufi. « Cela peut affecter la part d’audience et les performances des programmes de la chaîne ». Il affirme par ailleurs qu’Echourouk TV, peut sans problème concurrencer les deux chaînes du service public avec notamment les deux sitcoms « B73 » et « Familia high tech ».
Les Algériens ont-ils arrêté de regarder ailleurs ?
D’après Sofiane Maloufi, « c’est peu probable. Même si la tradition pendant le ramadan consiste d’abord à regarder les chaînes nationales. Elles proposent des programmes fédérateurs, familiaux. Mais, il est clair que les chaînes d’informations françaises restent très regardées à l’image de France 24, BFMTV ou iTelé. Et en ce moment, il y a aussi le sport avec l’Euro 2016 et la COPA América 2016 ».